mercredi 27 mai 2009

Chaque minute, mais plus chaque seconde

Elle regarde sa cuisse, touche sa jambe. Sa peau se dessèche. Elle devrait y mettre de la crème. Elle tend le pied, admire ses ongles faits. Elle n'a plus mal ou si peu. Est-ce l'effet de l'âge que sa peau si lisse et si dorée craquèle à présent ? Elle sait bien qu'elle y pense, chaque jour, chaque minute mais plus chaque seconde. Elle va mieux. Elle masse la crème onctueuse sur son mollet tendu. Elle sent sa présence qui la suit, qui la hante, mais elle vit avec désormais. Elle caresse son genou replié. Elle sent bien qu'une partie d'elle est rugueuse comme cette peau qu'elle nourrit de beurre de karité. Quelques flashes fusent encore, intenses, mais elle s'évertue à ne pas les regarder. Elle a toujours aimé ses pieds. Elle contemple ses orteils et un sourire irrépressible perce en se souvenant de la sensation de coton dont il lui avait parlé. Depuis peu, elle l'a testée. Deux ou trois jours à peine. Ça n'a pas produit l'effet escompté. Le seul dont elle se souvienne, c'est qu'elle a regardé faire, médusée, en attendant de ressentir l'effet, non pas sur ses orteils, mais dans son cœur abîmé. Elle va mieux, c'est clair. Ça ne lui a rien fait. Elle est allongée sur le lit, la tête appuyée contre le mur, la jambe relevée. Elle était si sure qu'il reviendrait. Elle frotte ses mains l'une contre l'autre pour faire pénétrer l'excès de crème. Elle est fière d'elle. Elle n'a pas bronché vendredi quand, en entrant dans le salon, elle a entendu Jane's Addiction. Elle n'était pas seule pourtant, A. et elle sortaient du lit à l'instant. Mais rien, pas un soubresaut, pas une larme. Sur le moment elle s'est dit "Voilà, j'y suis !". Elle y repense depuis avec un brin de nostalgie. Avoir mal, c'est intense. Avoir mal, c'est vivre aussi. Tout est sec, tout est mort. Le fantôme rôde encore, mais elle n'a plus peur de lui.

4 commentaires:

Bougrenette a dit…

définitivement P.o.L. pour le dire ça va être plus compliqué :-)

Le mal est peut être nécessaire, mais pouvoir s'en passer n'est ce pas un défi fantastique ?

Dana a dit…

J'ai lu et relu. P.o.L. , tu possèdes, franchement,une de ces âmes qui absorbent et gardent tous les méandres d'une passion avec la souplesse caressante d'un superbe velours.
Ta note m'a bouleversée et dépoussiéré un peu les fantômes, hélas...

Véropapillon a dit…

Si les fantômes ne t'empêchent plus d'être, je suis très heureuse pour toi ;o
Toi aussi t'aime bien tes pieds ???
Ca te dirait qu'on aille se faire masser chez mon fétichiste, je peux le recontacter, pour nos pieds ? ;o)
Bises de papillon

les nuages bavards a dit…

> Bougrenette
Perso je trouve que "le mal" est une saloperie dont on pourrait se passer... Quant à s'en passer, on essaie, on essaie... ca vient, ca vient ;)

> Dana
Désolée que ce billet vous ai à ce point touchée. Je préfèrerai vous faire sourire... Ca viendra sans doute. Merci pour votre commentaire que je prends néanmoins comme un joli compliment.

> Véro
C'est quoi encore st'histoire de fétichiste des pieds ?!! Y aurait-il des choses qui m'ont échappé dans tes aventures podologiques ? XD

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